Cinéma, Evénement
Michel Bouquet : il avait préparé sa dernière pièce à Boulogne-Billancourt
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Mort d'un géant discret
Monument du théâtre français, qualifié “d’acteur absolu”, le comédien au regard espiègle disait que seuls ses rôles lui “donnaient de l’épaisseur”. En 75 ans de carrière, il avait obtenu deux César et trois Molières, dont l'un pour son interprétation inoubliable du Roi se meurt d'Eugène Ionesco (plus de 800 représentations de 2004 à 2014). Légendaire dans L’Avare de Molière, subtil chez Chabrol et Truffaut, magistral Javert dans Les Misérables de Robert Hossein, celui qui avait intégré le Conservatoire en même temps que Gérard Philipe s'est toujours mis au service de grands textes classiques (Molière, Diderot, Harold Pinter, Strindberg) et contemporains (Beckett, Ionesco, Camus ou Thomas Bernhard).
Dans les studios de Boulogne-Billancourt
S'il préférait le théâtre au cinéma, Michel Bouquet a tourné dans plus d'une centaine de films, remportant deux César en 2002 et 2006. A l’aube de sa carrière, il avait été dirigé par Jean Grémillon pour un rôle écrit par Jean Anouilh dans Pattes Blanches en 1948. Avec sa maigre silhouette, son regard noir et son jeu torturé, il crève l'écran. Dans Mémoire d'acteur (Plon, 2001), il se dit "ébloui" par le réalisateur, sans lequel il n'aurait jamais poursuivi l'aventure du cinéma.
Sur les planches boulonnaises
Michel Bouquet s’était installé en résidence au Carré Belle-Feuille tout au long du mois de septembre 2015. Il y préparait la pièce "À tort et à raison" de Ronald Harwood, créée seize ans auparavant, qu'il a jouée le 3 octobre suivant devant la salle comble et reprise ensuite en tournée puis au théâtre Hébertot. Le comédien prêtait là toute sa force d’interprétation à un chef d’orchestre renommé, Wilhelm Furtwängler, soupçonné de sympathie avec le nazisme, face à un intraitable officier américain. La pièce fut l’une de ses dernières apparitions sur scène, à l'âge de 90 ans. A cette occasion, Michel Bouquet, son épouse la comédienne Juliette Carré et le metteur en scène Georges Werler avaient accordé un entretien passionnant et passionné au BBI.