Le célèbre écrivain Eric-Emmanuel Schmitt en visite au collège Jean-Renoir

C'est un événement assez rare pour que les jeunes de cette classe de troisième mesurent leur chance : non seulement ils recevaient en ce lundi matin un auteur contemporain dont ils avaient étudié plusieurs oeuvres en cours de français et d'histoire-géographie, mais cette rencontre était une véritable exception dans l'emploi du temps ultra-chargé du célèbre et prolixe écrivain.

Ce qui compte dans la vie, c'est la passion que vous mettez dans ce que vous faites !

Normalien, docteur en philosophie, lui-même fils de profs, Eric-Emmanuel Schmitt enseigna quelques années avant de rencontrer rapidement le succès il y a 27 ans avec sa deuxième pièce de théâtre, Le Visiteur (elle se rejoue en ce moment au Théâtre Rive Gauche, qu'il co-dirige). Depuis, il a écrit ou adapté plus de 30 pièces, publié 25 romans, essais et récits traduits en 43 langues, dont certains ont été adaptés à l'écran, 6 recueils de nouvelles, monté 5 spectacles musicaux, traduit deux opéras de Mozart, sans compter une vingtaine de livres lus, des contes philosophiques illustrés pour enfants, un scénario de BD...

Autant dire qu'en plus des 50 représentations annuelles qu'il donne sur scène, Eric-Emmanuel Schmitt ne peut répondre à toutes les sollicitations qu'il reçoit. Le Lyonnais a cependant pris le temps d'échanger avec cette classe de 3e 2 au sujet des trois livres étudiés (Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran, L'Enfant de Noé et Ulysse from Bagdad), mais aussi de ce qui l'a amené à l'écriture, de ses sources  d'inspiration, de ses méthodes de travail, de la notoriété... Généreux de conseils dispersés avec humour et humilité, la star de l'édition éprouvait un plaisir manifeste à renouer avec sa fibre pédagogue en répondant aux questions, très réfléchies, des élèves de Jean-Renoir. 

J'ai toujours écrit, même au collège. 

"A votre âge, j'étais un bon élève, j'aimais tout, sauf les langues, que j'ai appréciées par la suite. Je m'intéressais surtour à tout ce qui était créatif : la littérature, le dessin, la musique, le théâtre, le sport aussi. comme mes parents.. Mon professeur de français de 4e a été important : il m'a fait remarquer que j'étais doué car j'écrivais 'en imitant les auteurs que je lisais. Mon livre préféré était Le Petit Prince, d'Antoine de Saint-Exupéry, déjà un mélange de littérature et de philosophie ; c'est encore un livre de chevet, qui parle à tous les âges de la vie et qui fait toujours réfléchir."

Les rencontres, c'est ce qui fait une vie. 

"Moi, c'est l'immense comédienne Edwige Feuillère qui m'a mis le pied à l'étrier, comme elle avait lancé Alain Delon par le passé. Je lui ai envoyé ma première pièce, La Nuit de Valognes, elle m'a ouvert les portes du théâtre et m'a trouvé un agent. Une autre rencontre essentielle est mon éditeur, Albin Michel, avec lequel je travaille depuis 30 ans."

Ce n'est pas la page blanche qu'il faut remplir, c'est soi-même — quand on a une vie pleine, on a une page pleine !

"Il ne faut pas faire ce métier pour le succès, ni appliquer une recette, il faut le faire par qu'on aime écrire et rester vrai. Pour ne pas connaître l'angoisse de la page blanche, il faut être plein. Il faut vivre en faisant attention à ce qui nous entoure, en réflechissant à ce que disent les gens... Il n'y a pas de méthode, on est tous différents. Il faut trouver l'accès à l'endroit créatif du cerveau. L'école fait beaucoup appel à la partie analytique de votre esprit, à vous de faire l'équilibre avec votre imaginaire..."

Je suis l'auteur de mes livres, mais c'est le public qui est l'auteur de mes succès.

"J'ai beaucoup aimé enseigner la philosophie, car c'était donner la boîte à outils à l'autre pour qu'il puisse penser par lui-même, la clé de la liberté... Mais la vie m'a fait un cadeau : me permettre de me consacrer à l'écriture puisque, dès ma deuxième pièce j'ai été joué dans le monde entier. J'ai la chance de vivre de ma passion, d'être payé pour faire ce que j'aime. Je vous le souhaite à tous, c'est l'accomplissement total !"