Culture, Cinéma, Histoire
Boulogne-Billancourt et le 7e art, une histoire d’amour plus que centenaire
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1895. Le cinéma des frères Lumière est balbutiant. Et pourtant… Quelques années plus tôt, certains visionnaires, dont Étienne-Jules Marey, s’étaient penchés sur le potentiel de l’image en action. Né en 1830, professeur au Collège de France, président de l’Académie des sciences, de l’Académie de médecine et de la Société de biologie, il crée, en 1881, une station physiologique pour étudier le mouvement, installée sur les territoires de Paris et Boulogne. Un an plus tard, il invente le fusil chronophotographique qui décompose le mouvement en 12 images/seconde. Il met ensuite au point un appareil de projection et tourne le premier film. Les frères Lumière améliorent son système et en déposent le brevet. Le 13 février 1895, le septième art est né.
1908. La Société générale des cinématographes Éclipse fait construire des studios au 32, rue de la Tourelle. D’abord spécialisée dans les documentaires et les actualités, la société va enrichir et diversifier sa production avec des films historiques et artistiques et des adaptations de pièces de théâtre. Défilent alors devant la caméra des grands de l’époque : Sarah Bernhardt, Réjane ou Yvonne Printemps. Mais le développement du Parc des Princes et les risques d’incendie entraînent la fermeture des studios en 1923.
1923. L’aventure commence vraiment avec la création des studios de Billancourt au 49, quai du Point-du-Jour, par le réalisateur Henri Diamant-Berger. Depuis le succès de ses Trois Mousquetaires en 1920, il a pour ambition d’en tourner la suite. Pour cette production qui se veut hors du commun (plus de 2 millions de francs de budget), le réalisateur délaisse les décors en toile au profit du contreplaqué. Il fait donc appel à l’entreprise Niepce et Fetterer qui, après avoir connu le succès dans la construction d’avions en bois, s’est reconvertie dans le commerce de ce matériau. Venu passer commande dans les ateliers installés entre la rue du Fief et le quai du Point-du-Jour, Henri Diamant-Berger est séduit par le quartier. Il décide d’acheter une partie des usines Niepce et Fetterer pour y aménager, avec l’aide de l’architecte Robert Mallet-Stevens, des studios qui seront rapidement considérés comme les plus modernes et les mieux équipés d’Europe. Ils accueilleront dès le début des productions gigantesques telles que Napoléon, d’Abel Gance (1925), ou Fantômas, de Paul Fejos (1932). Le cinéma passe du muet au parlant et les studios atteignent leur âge d’or au milieu des années 1930 avec la société Paris Studios Cinéma, notamment grâce à des films empreints d’un réalisme poétique : La Grande Illusion, de Jean Renoir (1937) ou les films de Marcel Carné, Hôtel du Nord (1938) ou Le Jour se lève (1939).
1939. Les autorités d’occupation saisissent studios et productions. Financée par des capitaux allemands mais dirigée par le francophile Alfred Greven, qui s’affranchit souvent des directives de Goebbels et passe outre la censure de Vichy, la Continental-Films y réalise une trentaine de tournages, dont L’Assassin habite au 21 et Le Corbeau, de Henri-Georges Clouzot.
1941. Le réalisateur et producteur Léo Joannon s’associe avec le banquier Philippe Duperson ainsi qu’avec les Nantais Jean et Marcel Brochard (le premier est acteur, le second industriel) pour créer les studios du "Monde illustré", situés rue de Silly. Si quelques films y sont tournés pendant l’Occupation, il faudra véritablement attendre 1947 pour que naissent les studios de Boulogne.
Après-guerre. Les accords Blum-Byrnes favorisent dès 1946 l’importation du cinéma américain et permettent aux réalisateurs d’outre-Atlantique de venir tourner en France. Les studios de Billancourt et Boulogne ne désemplissent pas et les vedettes françaises y croisent les stars américaines. À partir de 1957, les studios de Boulogne comprennent jusqu’à 8 plateaux sur plus de 12 000 m². Au début des années 1960, les cinéastes de "la Nouvelle Vague" privilégient le tournage en extérieur. Leur tâche est facilitée par les évolutions techniques : augmentation de la sensibilité de la pellicule ne nécessitant plus d’éclairage surpuissant, utilisation de la bande magnétique qui permet d’enrichir le nombre d’informations pour le mixage, matériel de prises de vue plus léger. Mais certains réalisateurs tiennent à rester en studio. Dans les années suivantes, Boulogne-Billancourt prend l’apparence d’un "Hollywood-sur-Seine", accueillant Ken Annakin (Le Jour le plus long, 1962), Orson Welles (Le Procès, 1962), Stanley Donen (Charade, 1963), Sydney Pollack, Billy Wilder, jusqu’au James Bond Moonraker (Lewis Gilbert, 1979). On y tourne aussi La Grande Vadrouille (Gérard Oury, 1966), pour lequel une partie des égouts de Paris sont reconstitués. Quand l’activité diminue, vers la fin des années 1970, les studios retrouvent une certaine vigueur grâce à la postproduction et la postsynchronisation.
1989. Le constructeur de maisons Phénix rachète les studios de Boulogne pour y effectuer d’importants travaux de rénovation, de même que pour ceux de Billancourt, l’année suivante. Mais, en 1994, une grande partie de ces derniers est dévastée par un incendie. Ils devront être rasés un an plus tard pour faire place au nouveau siège de Canal +. Les studios de Boulogne, rachetés par la SFP, se mettent au service de la télévision. Rénovés en 1999, ils sont revendus en 2015 au groupe Vivendi et prennent le nom de Canal Factory.
En 40 ans et 26 films, Gabin détient le record des films tournés à Boulogne-Billancourt.
L’exposition consacrée à Jean Gabin concrétise le rapport historique entre Boulogne-Billancourt et le cinéma. Jean Gabin détient le record des films tournés dans l’un ou l’autre des studios, tout au long de quarante ans de carrière. Beaucoup sont des chefs-d’œuvre qui ont marqué le cinéma français.
La Ville a souhaité célébrer ce patrimoine en donnant à plusieurs rues ou avenues des noms de metteurs en scène, ou même de films tournés à Boulogne-Billancourt, dont deux films cultes avec Gabin : l’avenue Le-Jour-se-Lève et la rue de La-Grande Illusion.
Amphithéâtre Landowski. Entrée libre.
> Boulogne-Billancourt. Le temps des studios (12 avril à 19h30)
> Les 60 ans d’Un singe en hiver (8 juin à 19h)
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